jeudi 30 avril 2015

L'Enfant





Il est là depuis le début. D'ailleurs, c'était lui le premier.

L'Enfant est cette partie de soi qui ressent, qui "intuite", qui crée, qui s'amuse. L'Enfant, c'est cette partie de soi qui rit, qui pleure, qui pique des colères, qui a peur.
En gros, l'Enfant, c'est celui qui EST.
Au tout début, il était complètement ouvert, offert à l'amour, aux émotions, aux sensations. Il percevait tout ce qui l'entourait, même ce qui n'était pas dit, ces ondes invisibles qui font la vie.
C'est là, qu'il était parfaitement associé à son âme.
Et puis, les choses se sont gâtées.

Elles se sont gâtées car, en fonction des perceptions qu'il a eues de la réaction de ses parents lorsqu'il avait des sensations (faim, peur, envie de câlins), il s'est mis à croire, à imaginer. Parfois, il a cru que l'amour n'était possible que s'il correspondait aux attentes de ses parents, des personnes proches et importantes pour lui. Parfois, il s'est senti important car ses parents répondaient correctement à ses besoins, parfois, il s'est senti de trop...
Elles se sont gâtées car, à cause ou malgré cela, il a indéniablement commencé à plus ou moins s'éloigner de son essence, sans le savoir.
Et, en grandissant, c'est cet Enfant que l'on relègue parfois à des sphères lointaines, que l'on cache sous des couches et des couches d'interdits et de croyances que l'on a glanés par-ci, que l'on a entendus par-là...
Il est parfois tellement éloigné de son quotidien qu'on pense même qu'il n'est plus là.
C'est évidemment un leurre que beaucoup aiment entretenir, car il est toujours là. Enfoui, certes, mais bien présent.

Se connecter à lui est donc parfois extraordinairement difficile car on a oublié où il était. Il faut alors partir à sa recherche, le rencontrer, l'apprivoiser, et, à l'instar de Saint-Exupéry qui dessine une caisse pour le Petit Prince qui lui demande un mouton, lui donner l'occasion de s'exprimer dans toute son originalité.
Cela implique également de prendre des risques. Prendre le risque de se retrouver face à ses émotions refoulées. Prendre le risque d'ébranler ses convictions construites par une éducation, une culture. Prendre le risque de se découvrir une créativité que l'on n'imaginait pas. Prendre le risque de se retrouver face à des piliers qui s'écroulent. Alors souvent, on ne le fait pas.

Et pourtant, il est tellement précieux, cet Enfant, qu'il est important de le chérir, de le cajoler, de lui faire sa place au sein de soi. Mais comment faire ? Comment y parvenir quand on s'en est éloigné ?

Ca peut commencer par... l'écouter : chanter quand on en a envie, danser, dessiner, peindre... Bref, créer un instant, un objet, une émotion. Et on le sait bien : ça fait un bien fou !! Eh oui, parce que libérer l'Enfant le fait respirer, l'ensoleille, le fait briller.
C'est se laisser émerveiller par des choses simples, les apprécier juste parce qu'elles sont, c'est se laisser pleurer quand la tristesse envahit son coeur, c'est se laisser rosir quand la chaleur du bien-être envahit son corps, c'est se laisser faire un compliment à quelqu'un, juste parce qu'on le pense fort et sincèrement. C'est accueillir sa spontanéité, sans peur, sans jugement de soi, sans fard. Et puis le reste viendra...

Finalement, accueillir cet Enfant, c'est juste... se laisser être SOI.



mardi 28 avril 2015

Logo-Rallye 5 : La chute

La suite de nos aventures (texte précédent : Boulangerie) a été écrite d'après les mots proposés suivants :
- Curling, Choucroute, Surenchère, Rugby, Coloriage, Circonflexe, Eucalyptus, Tente, Pieuvre, Privatisation, Infundibuliforme, Electrisé, Fête nationale, Microbe.
Merci aux participants !!

Célestine commençait à recouvrer ses esprits. Aussi loin qu'elle se souvienne, elle allait monter dans le bus et... là, elle se trouvait à côté d'une tente bérbère où l'on servait le thé à un bonhomme bizarre. Elle était donc pour le moins confuse.
Ses souvenirs refluant petit à petit, elle se rappela avoir eu la vision brouillée, tout étant circonflexe autour d'elle dans ce bus dans lequel elle était montée, juste avant que ce ne soit le néant.
Elle regarda de nouveau le gars devant son thé. Il lui rappelait quelqu'un, mais qui ?
A côté, on vantait les mérites du Curling Pro, le dernier friseur à la mode, en face, on vendait des pétards pour la fête nationale, et un peu plus loin, un poissionnier saisissait une pieuvre par un tentacule et s'époumonait qu'il était frais de ce matin, son monstre marin. Et presqu'en face de lui, un autre poissionnier y allait de sa surenchère en beuglant qu'elle était bonne qu'elle était fraîche sa choucroute de la mer. Et l'autre de beugler encore plus fort qu'il n'y avait pas mieux que l'anguille pour un repas électrisé ! On se serait cru dans le village d'Asterix... et Célestine compris alors qu'elle se trouvait dans un marché.
Elle se reconcentra sur le petit homme dans la tente berbère. Et là, parmi les plats à tajines bien reconnaissables à leur couvercle infundibuliforme et les verres à thé, notre amnésique ne le fut plus. Elle se souvint même de l'odeur qui l'avait envoûtée.

Maintenant qu'il savait cuisiner, Grxz ne voulait plus manger ses humains crus. Il avait donc voulu passer rapidement au marché pour y acheter quleques épices pour accompagner sa fantastique prise. Il n'avait cependant pas prévu le liquide dangereux que le vendeur lui proposait, mais l'avait pris néanmoins, se demandant quelle excuse il pourrait avoir pour ne pas l'ingurgiter. Cela sentait une odeur forte et parfumée qui le dégoûtait. Il se retourna pour s'assurer que sa proie docile était toujours là, et il s'aperçut qu'elle commençait à émerger. Il posa le verre et s'avança précipitamment de sa démarche de pingouin et allait renvoyer son haleine putride sur Célestine lorsqu'il trébucha sur un chien. Il tomba en avant face la première, et, en touchant le sol, sa tête se déforma jusqu'à avoir la forme d'un ballon de rugby. Cela ne dura que quelques dixièmes de secondes mais Célestine semblait l'avoir remarqué car elle était complètement horrifiée.
Un homme s'approcha de Grxz et profita qu'il était parterre la bouche ouverte par le choc pour y glisser un bonbon à l'eucalyptus. Mais quel était ce goût frais et immonde qui se répendait entre ses mandibules ? Maintenant, c'était à lui d'être sonné.

Jean-Philémon de la Rouflaquette se tint d'un coup d'un seul sur le dos de Grxz et lui entortilla les bras derrière le dos avec sa ceinture. Il avait réussi à retrouver leur trace grâce au flair infaillible de Satan, et les deux détectives les avait rattrapés in-extremis au moment où ils entraient dans le marché. Ils les avaient suivis, et le paléontologue s'était improvisé une planque, s'adossant à un mur et derrière un journal dont la couverture demandait la privatisation de l'Education Nationale, pour ensuite observer les deux protagonistes qui s'étaient arrêtés. Il venait de tourner la page sur un coloriage lorsqu'il s'aperçut de la confusion de Célestine. Dès lors, ils avaient opéré rapidement : comprenant qu'elle reprenait ses esprits et voyant le microbe se retourner vers elle, Satan avait bondit en avant au moment où Grxz allait gazer sa cible. Jean-Philémon avait alors agit sans réfléchir et sauté sur le minus. Il n'en revenait pas de tant de synchronisation et de rapidité. Il avait l'impression d'avoir toujours fait ça !

Il finit de ficeler son prisonnier et, un peu intimidé, tendit une main hésitante à une Célestine médusée.
- "Mes hommages, chère madame, je me présente : Jean-Philémon de la Rouflaquette. Mais vous pouvez m'appeler Jean-Phil..."


Et la suite ?
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vendredi 24 avril 2015

Être parent ou comment atteindre la condition animale





Avant d'être parent, ça peut arriver... Mais pas tant.
Tu peux être un vrai clébard, piailler comme une pie, avoir une mémoire de poisson rouge ou encore être franchement rat, ça reste général, une manière qui te définit assez globalement, et ce, souvent d'une manière durable. 

Là où vraiment le rôle de parent te fait atteindre des sommets, c'est en te donnant l'occasion de changer plusieurs fois de peau (ou plutôt de pelage) dans la journée. Et là, on n'est plus dans la définition d'un trait de ton caractère, on est réellement dans la description d'un état bien spécifique qui est susceptible de changer 10 fois dans la journée (minimum). Si tu te rappelles vaguement tes cours d'espagnol, en gros, avant d'être parent, tu utilises SER, et quand tu es parent, tu utilises ESTAR...

En voilà un exemple, juste le temps du petit-déjeuner.

Quand t'es parent, donc, et quand c'est le week-end ou un jour où y a pas à réveiller tes marmots, déjà, ta journée commence félinement. Tu t'étiiiiiiiires tranquillement, tu sautes d'un pas léger et archi-silencieux de ton lit à la porte, tu passes par l’entrebâillement en mode furtif, puis, en misant sur tes coussinets pour ne faire aucun bruit, tu atteins la cuisine de ta démarche chaloupée. Attention, c'est là qu'il faut limiter le rôle : TU NE MIAULES PAS pour réclamer ta pitance !! Rappelle-toi, tu rêves de prendre ton petit-déjeuner tranquillement, pas de faux-pas ou c'est fichu. Et inutile de mettre les bols des enfants sur la table, ça pourrait faire du bruit. Tu es un chat, rappelle-toi, et un chat est égoïste.

Lorsque les enfants sont debout et arrivent encore les yeux tout collés de sommeil, ton cœur s'amollit dangereusement et tu te transformes d'un coup d'un seul en poule, tu déploies tes deux ailes et t'en prends un sous chacune. Tu couves 5 bonnes minutes, puis tu vires toutou en les reniflant et en leur léchant la poire.

C'est là qu'ils traînent un peu à aller se mettre à table et que l'oie qui est en toi se met à cacarder pour rappeler à l'ordre ses oisons tout en partant se dandiner de la croupe entre la table et le placard pour remplir leur mangeoire.

Ensuite, au moment où la cuillère sort malencontreusement du pot de miel en mode salto-arrière-triple-vrille-réception-sur-la-table (preums) et parterre (deuz), c'est l'ursidé plantigrade qui s'excite et te voilà grognant sur tes oursons, la gueule pleine de dents bien sorties, bave à l'appui. 

L'orage passé, ta progéniture te fait rapidement devenir chèvre en te demandant une tartine de truc, euh en fait non, plutôt une crêpe au machin, mais finalement si, la tartine de truc mais avec du miel-mais-faut-laver-la-cuillère-avant... 

Tu t'apprêtes à donner un p'tit coup de cornes dans le tas quand tu te rappelles à grand effort que la violence ne résout rien et te voilà panda sur ta terrasse à faire quelques mouvements de Tai Chi, histoire de te calmer pour ne pas passer dans les faits divers pour double infanticide.

Lorsque tu reviens, rasséréné(e) ou presque, tu te transformes en bécasse au moment précis où tes enfants essaient de te convaincre qu'en fait, aucun des deux ne sait pourquoi un des bols est renversé et que même que c'était très certainement comme ça quand ils sont arrivés.


Le lion vient alors en renfort, fait nettoyer tout ça à grands coups de rugissements bien sonores, puis envoie ses lionceaux se laver les crocs.

Enfin, quand l'un deux te dit que "Bidule eh ben il m'a traité de sale fouine l'autre jour !" ton instinct lupin se réveille et tu prends ton louveteau par la peau du cou pour l'amener dans ta tanière et tu lui dis que si Bidule recommence, il aura affaire à tes canines.

Pfiou !! Même pas une heure que t'es debout, et t'as déjà vécu 10 métamorphoses... Autant dire que si la série existait encore, tu pourrais postuler pour doubler Manimal.

Et bien ironiquement, c'est souvent quand les journées commencent de la sorte que tu te sens ensuite la vivacité d'un pachyderme...

mardi 21 avril 2015

Petit traité de courtoisie à l'usage des gros relous




Cher gros relou, si jamais le hasard t'amenait par ici, sache que cet article est pour toi. Oui, c'est cadeau, ne me remercie pas, ça me fait plaisir...

Cher gros relou, voilà donc gratuitement quelques conseils pour t'aider à choper non pas des filles mais des réflexes qui te rendront peut-être un peu plus humain.
Humain, tu l'es déjà, dis-tu ? Physiquement, oui, tu as raison... Tu marches sur deux pattes et... et... la suite déjà me vient plus difficilement. Parce que pour le reste, permets-moi de te dire qu'il est tellement bien caché que tu n'atteins presque pas non plus le niveau de l'animal qui arrive à être souvent plus courtois que toi. Et je vais te confier un secret : en amour, les filles n'aiment pas les animaux...

En effet, il est rare qu'une fille se pâme devant un gentleman qui lui lance un "Hey Beauté ! Tu m'files ton 06 ?" ou encore un "Pssssst ! Tu viens me montrer comment c'est sous ta petite jupe ?". Étonnamment, la fille ne réagit pas favorablement à ce type de demande par un "Mais bien sûr ! Je te montre ici là tout de suite où tu m'emmènes sur ton cheval blanc dans ton palais pour qu'on soit plus tranquille ?", mais plutôt par un "..." ou un "..." ce qui est sensiblement similaire. Ben oui, la plupart du temps, la fille ne dit rien, tant elle est sidérée, ou tant elle est blasée.

Et tu sais quoi ? Non, ce n'est pas un compliment d'entendre un "Oh Madame ! Comment t'es trop bonne !" surtout que lorsque on te répond par un regard qui tue ou par rien, tu lances un "Allez pétasse ! Dégage, t'as un gros cul !" dont l'insulte vient rapidement doucher cette belle intention que tu avais initialement... Mince alors... En plus, tu n'es pas cohérent.
D'abord le "compliment", puis l'insulte... Tu sais ce que tu veux, dis ?

Et puis dis-moi, entre nous, tu penses vraiment arriver à pécho comme ça ?
Parce que depuis le temps, t'as peut-être remarqué que ça marchait pas trop, non ? Non ??
Ah bon... Certainement parce que tu penses que les filles qui ne disent rien rougissent de plaisir et de timidité...
Et encore une fois, je vais te décevoir, gros relou. Elles ne rougissent pas de béatitude de tant de poésie fleurie lancée sur leur douce chevelure telle des pétales de roses odorants, mais de honte, de colère, d'humiliation. Elles retiennent la plupart du temps de grosses insultes qu'elles ne préfèrent pas dire de peur que tu ne leur en mettes une, et surtout, de peur de devenir comme toi, régies par des émotions négatives et destructrices. Elles préfèrent prendre sur elles ta connerie, et partir en se disant qu'il est inutile de te mettre le nez dans le gros caca dans lequel tu te trouves déjà, tu en es déjà tellement empreint.

Donc, maintenant que tu sais que ça marche pas, dis-lui plutôt... rien du tout. En fait, tu fermes bien ta gueule tu dis rien et tu la regardes DISCRETEMENT, mais ça c'est si vraiment tu peux pas t'en empêcher. Parce que même ce regard-là est dégoulinant de mépris et de concupiscence.

Et ne désespère pas, cher gros relou... J'imagine que par ces tentatives maladroites, tu cherches à te faire aimer, comme tout le monde...  Et un jour, tu y arriveras... Cela dit, cela marchera quand tu arriveras à te considérer comme un Humain, Toi... Et quand tu auras gagné cette estime de toi, peut-être arriveras-tu à estimer les autres.

Alors, vas-y Gros relou ! Tu m'files ton estime ? Tu m'enlèves cette jolie poubelle de dessus ton âme ? Allez, quoi... Chuis sûre qu'elle est magnifique !






dimanche 19 avril 2015

Logo-Rallye 4 : Boulangerie


La suite de nos aventures (texte précédent : Traque) a été écrite d'après les mots proposés suivants  : 
Rhododendron, Hypnothérapie, Sigisbée, Dimiboulettes, Éclectique, Anticonstitutionnellement, Panaris, Chamallow, Pot-pourri, Bling-bling, Pâques, Pschiiiiiit, Basket.

Merci aux participants !!

Jean-Philémon de la Rouflaquette, les jambes encore chamallow et le souffle court, sentit que la blonde ne paraissait pas nette. Comme elle était de dos, il était difficile de le vérifier mais sa démarche était un peu bizarre : elle avançait un peu en automate, guidée par le rase-moquette à côté qui ne se comportait pas tout à fait en sigisbée. Était-elle sous son contrôle ? Il semblait y avoir anguille sous roche et Jean-Philémon était bien décidé à découvrir le pot-pourri (il savait bien que l'expression exact était "pot aux roses", mais il trouvait que "pot-pourri" était plus adapté à des situations bien détériorées, alors que ces mélanges de rhododendrons-roses-géraniums séchés qui égayaient son salon n'avaient rien de pourri, au contraire. Il avait donc décidé de réattribuer le mot à sa guise)...

Il se colla au mur en plaquant son chien contre lui lorsque les deux traqués entrèrent dans une boulangerie. Il regarda par la vitrine, à travers les œufs de Pâques étalés en devanture, et cru distinguer le gars étrange montrer quelque chose sur l'étal, d'un doigt affreusement long et boursouflé en son extrémité comme s'il avait un panaris gigantesque. Il paraissait ne pas avoir ouvert la bouche, mais la vendeuse l'avait compris, semble-t-il, et le servait sans paraître s'offusquer de telles manières. 
En tout cas, ses goûts ne semblaient pas bien éclectiques car Jean-Philémon constata que la serveuse lui tendait un sac rempli de meringues uniquement, toutes natures, mais en grande quantité. Il ne paya pas et se retourna avec la blonde pour sortir. C'est là que Jean-Philémon vit la femme de face. Il fut immédiatement interpellé par le ballon de basket dessiné sur son t-shirt et qui était déformé par le relief que lui donnait sa poitrine opulente. Se reprenant de cette vision quelque peu ébouriffante, il regarda son visage et s'aperçu qu'elle était tout à fait jolie, hormis son nez un peu pointu, et avait les yeux dans le vague, comme ceux qu'il avait déjà vus en hypnothérapie de groupe, sur les patients en cours de travail. 

C'est au moment où ils allaient sortir de la boutique qu'une vieille dame très bling-bling interpella violemment Jean-Philémon :
Vous agissez anticonstitutionnellement, Monsieur ! On n'espionne pas les gens de la sorte, non mais ! lui dit-elle derrière ses culs de bouteilles et en brandissant un doigt accusateur sous son nez.
- Pardon madame, mais vous êtes peut-être en danger, je file de dangereux individus ! improvisa le paléontologue.
La vieille, un peu sceptique, se tourna néanmoins et regarda dans la direction de Grxz et Célestine qui s'éloignaient. Au vu de leur apparence plutôt patibulaire, elle sembla convaincue et décida qu'elle pourrait intervenir.
- Ah mais je peux vous aider, Monsieur ! dit-elle en sortant sa bombe lacrymogène d'un sac affreusement doré. Je peux les neutraliser avec ça et... Pschiiiiiit ! N'ayant jamais utilisé la chose, elle avait malencontreusement appuyé sur le bouton et s'aspergea de gaz lacrymo. Elle commença à haleter, toute paniquée qu'elle était, et, tâtonnant au hasard, envoya un coup de main pleine de bagues dans le museau de Satan qui couina tristement.
Jean-Philémon tenta de la calmer, lui ôta ses lunettes qui l'avaient heureusement protégée d'une grande partie de la dose lacrymogène, et la fit s'asseoir sur la terrasse de ce resto où l'on servait ces fameuses Dimiboulettes qu'il adorait. La patronne, qui avait vu la scène, apporta à la vieille un verre d'eau. Elle lui fit signe qu'elle allait s'occuper d'elle, et l'enquêteur, entraîné par son chien impatient de filer sa cible, put reprendre sa traque.

Sauf qu'il n'y avait plus personne à traquer, les deux bizarreries avaient disparu...



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mardi 14 avril 2015

Nos besoins, quel bazar !


Un matin, j'étais au volant, ma Nounette à couettes bien installée sur le siège arrière, et je conduisais tranquillement en retour de nos courses salvatrices de miel, quand tout à coup, le téléphone sonna.
La sonnerie personnalisée me donnait l'indice de l'appelante et, voulant la rassurer car connaissant sa demande, je répondis... Certes, du bout des doigts, certes sans mettre le téléphone à l'oreille et en parlant fort avec le haut-parleur en marche, certes en raccrochant au bout de 10 secondes, mais... Je répondis !
Moi qui sais que c'est :
1- Pas autorisé
2- Dangereux
3- Pas autorisé PARCE QUE dangereux
4- N'importe quoi tellement ça a déjà fait plein d'accidents.
Et pourtant, en maman avertie, en femme responsable (et en tout ce que l'on veut de super magnifique pour désigner ma charmante personne), et en conductrice respectueuse des règles (ou presque), je REPONDIS !!
Je t'ai dit que j'ai répondu ? Oui ? Ah ok...

En répondant, déjà, je sentais d'avance la lanière de cuir me flageller l'épaule, et après avoir raccroché, non seulement je lâchai le reste du fouet sur mon dos, mais je me lançai dans une introspection flash-éclair pour comprendre les raisons de cet acte que je condamne.
La réponse m'est vite arrivée : parce que mon besoin de rassurer la personne qui m'appelait était plus important que mon besoin de sécurité pour moi et pour les autres.
QUOI ??? Mais n'importe quoi !! Comme si l'autre pouvait pas attendre 5mn que tu rappelles, ou 10mn que tu rentres ? Ben si pourtant.
J'aurais pu nous mettre en danger, ma Nounette et moi, j'aurais pu mettre d'autres personnes en danger, et moins grave, j'aurais pu abîmer ma voiture ou un bout de mobilier urbain... Et tout ça parce que je ne sais pas faire le tri dans mes besoins.

Allez, rentrons dans l'univers étrange et mystérieux de cette hiérarchie de besoins... Qu'est-ce qui a fait que je ne l'ai pas respecté, ce besoin de sécurité ? Qu'est-ce qui fait que j'ai fait passer devant lui un besoin qui concerne autrui, donc, à savoir, pas moi ? Eh bien les mêmes raisons qui font que je vais penser aux autres avant de penser à moi, animée par un autre besoin bien profond : celui de plaire, d'être appréciée, aimée.
Tiens, c'est pas déjà celui-là qui m'a fait dire OK à une soirée alors que j'étais crevée et que j'avais un fort besoin de repos ? C'est pas aussi celui-là qui m'a fait aller voir ce film avec bidule qui voulait absolument le voir alors que c'était un autre que je souhaitais voir ? Et c'est pas aussi celui-là qui me fait dire oui à encore plus de travail alors que je suis déjà à 200% de mes capacités ? Ben si... A chaque fois, si.
Mais alors, il compte tellement que les autres comptent pour du beurre ? Ils sont la pour de faux ? Pour faire joli ? Ben non... A chaque fois, non. 
Mais c'est tout comme parce que je laisse faire, parce que ma peur de ne pas plaire est la plus forte.
Mais pourquoi ? L'autre est-il plus important que moi ? C'est ça, en fait, c'est parce que moi je ne vaux pas autant ? Que nenni ! Je suis aussi importante que l'autre !
Et pourtant, je mets en retrait mes propres besoins, aussi importants soient-ils, pour lui plaire, au risque de me faire du mal, de me mettre dans le rouge, d''avoir un accident. C'est ballot, quand même....

Ah... alors n'est-il pas nécessaire que j'aille mettre un peu d'ordre dans tout ça ? N'est-il pas primordial que je classe mes besoins par rapport à MON bien-être ?
Ben si... Primordial et urgent, car si je ne le fais pas, personne ne le fera, et je continuerai à prendre des risques, sur la route, sur ma santé, sur mon humeur, sur mon amour. Ce serait ballot, encore, car finalement, la personne avec qui j'ai de grande chances de vivre le plus longtemps, c'est avec moi, non ? Alors autant que je l'apprécie et que je lui donne la place qu'elle mérite, à cette personne précieuse. J'aurai peut-être alors moins besoin de "plaire". Et je suis sûre que les autres comprendront. Peut-être même qu'ils en feront autant. C'est en tout cas tout ce que je leur souhaite...
 

lundi 13 avril 2015

Logo-Rallye 3 : Traque





La suite de nos aventures (texte précédent : Ferrage) a été écrite d'après les mots proposés suivants  : 
Satan, Tartiflette, Triangulation, Dyspnée, Bambou, Rouflaquette, Bulbe , Démangeaisons, Estomac, Suppurer, Couillu, Croquettes, Nématocère, Chandelle, Orthodontiste, Procrastination, Paléontologie 

Merci aux participants !!



Le chien tirait comme un damné sur sa laisse en voyant la cible s'éloigner.
- Satan, reste calme ! On va se faire repérer !
- Grrrrrrrrr
- On va y arriver, t'inquiète. On descend, on descend !
Il tapota doucement la tête du berger-allemand qui se calma en descendant du bus.

Jean-Philémon de la Rouflaquette était le dernier d'une lignée d'orthodontistes renommés. Au grand désarroi de son père, il avait cassé la tradition et s'était lancé à corps perdu dans des études de paléontologie, passionné qu'il était par les fossiles, les êtres vivants et leur évolution. Ceci dit, il ne se doutait pas, en embrassant cette carrière, que ses recherches prendraient une tournure bien surprenante...

Ce jour-là, s'étant retrouvé accroupi à l'arrière du chantier de fouilles, plié en deux par des crampes d'estomac et prêt à rendre la tartiflette qu'il avait ingurgité au déjeuner, son attention fut captée par une sorte de gros bulbe verdâtre qui semblait bouger. En homme ordonné et sensé, il vomit d'abord et alla voir ensuite.
Oubliant toute prudence, il s'approcha et s'aperçut que le bulbe se mouvait à l'aide de 6 pattes aussi fines que celles d'un moustique. La chose se retourna, le faisant sursauter et crier même un peu, et il put distinguer comme 3 yeux jaunes vitreux qui regardaient dans 3 directions différentes... dont la sienne. La chose se mit alors à suppurer une substance nauséabonde qui lui attaqua les narines. Il fut aussitôt assailli de démangeaisons, et pris de tels hauts le cœur qu'il frisa la dyspnée. La créature s'avança vers lui prestement et aurait pu l'atteindre si Satan n'était arrivé à ce moment-là, montrant les crocs mais sans trop s'approcher quand même... L'espèce de bulbo-truc se retourna alors et pris la fuite sous les aboiements du molosse. C'est lorsqu'il était presque hors de vue que Jean-Philémon pensa être pris d'une hallucination : le bulbe à pattes de moustique venait de se transformer en humain ! Un petit homme bizarre se trouvait maintenant à la place de l'affreuse créature et marchait, ou plutôt se dandinait, d'un pas rapide vers l'arrêt de bus.
Jean-Philémon était confus. Après ce coup de bambou inattendu, il avait du mal à réaliser ce qui se passait, encore tout grogui et flagellant des genoux. 
Cela dit, en homme curieux et plutôt couillu, il ne se laissa pas flancher et, prenant appui sur son chien, il se leva. Pas de procrastination ! pensa-t-il, ce phénomène est trop incroyable pour perdre sa trace !
- Je te dois une fière chandelle, mon chien ! lança le paléontologue à Satan en se grattant encore les aisselles, double ration de croquettes en rentrant ! Mais avant, nous devons suivre cet... euh... ce... nématocère ! 
Le chien acquiesça d'un "wouf !" affirmatif, pensant bien qu'une triple ration pourrait être en jeu.
Faisant un rapide calcul mental par triangulation de la distance qui les séparaient, eux et le truc, Jean-Philémon avait déduit qu'ils pourraient le rejoindre en moins de 2mn si la créature ne changeait pas d'allure et si eux-mêmes marchaient d'un pas rapide, juste avant, il l'espérait, que le bus n'arrive.
Ses calculs s'étaient avérés exacts et ils avaient pu le rejoindre discrètement, montant par l'arrière du bus juste avant que les portes ne se referment. Du fond, ils virent la créature assise à côté d'une blonde un peu bizarre elle aussi. Était-elle une de ses congénères ?

Arrêt Lapeyronie. La blonde et la chose descendirent là, et c'est de là que Jean-Philémon et son fidèle animal les suivirent de loin, d'un pas prudent mais déterminé.



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mercredi 8 avril 2015

Pierre qui tant roule à l'eau qu'à la fin elle mousse

Nous sommes depuis toujours entourés de locutions proverbiales.

De quoi ?? De lo-cu-tions pro-ver-bialeeeuh ! Tu sais, le truc que t'entends assez souvent sans savoir toujours de quoi il retourne... Tu vois toujours pas ? Bon. Alors assieds-toi, prends un petit café ou un thé bien chaud (ou une petite binouze, t'inquiète, je suis pas sectaire) et on va revoir ensemble quelques-unes de ces petites phrases et d'où elles proviennent...

Allez, c'est parti mon kiki !!
Tiens, déjà ça, c'est pas une locution machin-truc ? Bah un peu mon n'veu ! Elle est partie des années 30 et était ce que disaient des dames de petite vertu pour racoler leurs clients, puis pour prévenir les copines qu'elles s'absentaient quelques minutes avec le chaland... Tiens tiens... Étonnant, non ? C'est parti mon kiki, alors ?

Ben oui, parce que les voyages forment la jeunesse !
Et ne va pas imaginer là que parce que t'es parti chez mémé Marie-Philomène 3 étés de suite quand t'avais 10, 11 et 12 ans ta jeunesse est formée. Ou alors un peu car le lever à 7h du mat' pour aller donner à manger aux poules, traire les vaches et œuvrer au fromage de chèvre tous les matins, ça forme, mais pas pareil.
Non, il faut avoir vraiment voyagé d'un pays à l'autre, visité, découvert d'autres manières de faire et de vivre pour que cela soit valable. Encore que... Dans un contexte très actuel où les avions tombent comme des mouches, parfois, ça marche pas.

Ne vendons [alors] pas la peau de l'ours avant de l'avoir tué.
Ce très ancien proverbe, était initialement celui-ci : "il ne faut pas marchander la peau de l'ours devant que la beste soit morte", très proche de son cousin turc "On ne vend pas le poisson qui est encore dans la mer" et signifiait qu'il serait un peu crétin de crier victoire trop à l'avance, sinon, non seulement t'aurais l'air un peu niais, mais en plus, t'aurais trop grave les boules tu serais bien désemparé de n'avoir pas accédé à ton vœux.

Cela implique donc de ne pas mettre la charrue avant les bœufs.
Parce que le paysan de jadis qui mettait sa charrue devant ses bœufs en soirée pour signifier la fin de son labeur, se serait vu bien empoté de le faire le matin pour démarrer sa journée : c'eût été faire preuve d'illogisme... Un peu comme toi quand tu mets tes chaussures avant tes chaussettes ou que tu parles à ton conjoint le matin avant qu'il ait pris son café... Illogique ET dangereux !!

Car Tant va la cruche à l'eau qu'à la fin elle casse
Et non, n'imagine pas une fille bien demeurée qui irait se baigner... Tu le sais bien, cela veut dire qu'à force de répéter une action qui comporte un danger, celui-ci finit toujours par arriver.
En gros, à force de mettre la charrue avant les bœufs tous les jours en parlant à ton conjoint avant sa dose de caféine matinale, ben y a bien un jour où tu vas commencer ta journée avec une beigne bien placée.

Et Pierre qui roule n'amasse pas mousse
Non non, ne va pas imaginer le copain Pierrot roulant sous la table et tentant de récupérer sa bière qu'il a fait dégouliner... Il s'agit là du fait que tant qu'on est en mouvement, eh bien on n'amasse pas grand chose. Autant persévérer et rester stable et attendre que l'oseille entre tout seul dans ton porte-monnaie. Bon, OK, ceci ne s'applique pas à Mick Jagger et ses copains...

Quand il amasse, il peut ensuite Dormir sur ses deux oreilles
En voilà une expression qu'elle est débile, parce que sauf si tu t'appelles Jar Jar Binks et à moins que tu aies des bassets dans ton arbre généalogique, il y a peu de chances que tu y parviennes !
En fait, l'origine de l'expression est assez floue, mais une des pistes nous dit qu'il s'agirait d'une traduction latine erronée, car l'expression disait initialement "Dormir sur celles des deux oreilles que l'on veut", et non pas selon la traduction italienne "entre deux oreillers" qui sous-entendrait que tu dors sans rien entendre, donc, tranquille, mais évidemment pas confortablement, sauf si tu as AUSSI un oreiller SOUS la tête. On devrait en conclure qu'il faudrait être alors bien pourvu en oreillers pour dormir comme une souche...

Certainement, parce que sinon tu te réveilles avec la tête dans le cul, locution imagée autrement désignée par "syndrome céphalo-rectal", qui t'incite à deviner qu'il serait bien malaisé de comprendre le monde environnant, le tout étant bien atténué, si ta tête se retrouvait malencontreusement dans ton fondement.

Le concernant, d'ailleurs, il est recommandé qu'il ne faille pas non plus Péter plus haut que son cul, à savoir, se la péter grave, parce que cela pourrait t'amener à te retrouver encore une fois dans une position bien incongrue et peu confortable, sauf si tu arrives à sauter au bon moment... Tout est question de timing.

Mais même là, dis-toi que tant qu'il y a de la vie, il a de l'espoir, car tant que tu es vivant, il peut toujours se passer quelque chose de sympathique dans ta vie, voire Monts et Merveilles.

Tout ceci étant dit, Après moi le déluge, et, A bon entendeur, salut...


dimanche 5 avril 2015

Logo-Rallye 2 : Ferrage



La suite de nos aventures (texte précédent : Abribus) a été écrite d'après les mots proposés suivants :
- Inorganique, Cucurbitacée, Barbapapa, Lapeyronie, Francophage, Chaussette, Métamorphose, Rachitisme, Ornithorynque, Coquillage, Tapage nocturne, Constipation occasionnelle, Immatriculation, Mirage, Haleine.


Encore merci aux joueurs !
(Oui, même s'ils ont été un peu plus taquins que la fois précédente)




Célestine ne savait pas si elle devait monter d'abord et laisser cette bizarrerie de la nature lui mater sa cucurbitacée, ou bien le laisser monter et risquer de perdre définitivement ses capteurs olfactifs en le suivant.
N'ayant pas envie d'offrir à ce spécimen son derrière en vue royale, elle opta pour la deuxième alternative, se disant qu'elle était parfaitement capable de tenir l'apnée le temps de la montée. Elle eu cependant la maladresse de lui faire signe de passer, AVANT de retenir son souffle, et cette créature frappée de rachitisme lui dévoila un sourire jaune en lui lançant un "merci" dont l'haleine vint la heurter de plein fouet. Jamais elle n'avait senti une telle odeur de chaussette pourrie provenant de la bouche d'autrui ! Mais qu'avait-il mangé ? Des coquillages avariés ? Du Christmas pudding de l'année dernière ? Elle avança dans l'allée, encore époumonée et quelque peu ébaubie, puis, très étonnamment mais irrésistiblement, alla s'asseoir pile à côté de lui dans le bus... Elle voyait flou, comme dans un mirage, et même en se concentrant à fond elle n'arrivait pas à déchiffrer l'immatriculation du véhicule roulant devant eux. Elle était toute bizarre, ne comprenait pas ce qui se passait, et pourtant elle se sentait incroyablement bien.

Grxz, ou Blaise de son nom terrien, était ravi. Cela avait encore fonctionné et elle venait de s'asseoir à côté de lui. Certes, elle n'était pas tout à fait son genre, avec ses cheveux mousseux à la barbapapa et son grand nez de gallinacée, mais elle avait assez de volume pour faire un repas copieux, c'était l'essentiel. Depuis quelques temps, il préférait de loin les composés vivants aux absorptions inorganiques qui lui donnaient de petites constipations occasionnelles bien désagréables. D'ailleurs, il penchait même maintenant exclusivement pour les humains, ayant récemment et nuitamment ingurgité dans un zoo une drôle de créature dont il n'avait pas bien digéré le bec, un ornithorynque, avait-il ensuite lu sur la pancarte, qui lui avait conséquemment bloqué la métamorphose pendant quelques heures une fois rentré chez lui. Cela avait causé quelques dégâts dans l'appartement, créant par là une nouvelle occasion aux voisins de se plaindre de tapage nocturne, et il eu bien peur de se faire démasquer.
Depuis, il développait non seulement son goût pour les humains mais allait même jusqu'à devenir intégralement francophage tellement la chair des habitants de ce pays était tendre et douce au palais. Ça et les meringues.

Tiens, en parlant de meringues... Arrêt Lapeyronie, c'était là qu'ils allaient devoir descendre...




Et la suite ?
Toujours possible grâce à vos propositions sur https://www.facebook.com/abracadabraleblog !

jeudi 2 avril 2015

Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants...




Ça commence toujours par : "Il était une fois..." avec dedans, l'histoire d'une princesse qui attendait son prince charmant (rarement l'inverse).
Et l'histoire veut qu'après plein de trucs bizarres mais assez communs, somme toute (transformation en souche dormeuse enfermée dans un donjon, coma profond engendré par une pomme ou encore séquestration dans une haute tour pour utiliser ta tignasse à des fins de cure de jouvence), eh bien la princesse trouve chaussure à son pied (ça c'est pour Cendrillon), mais surtout l'homme de ses rêves, celui qui viendra la sauver et signer par là la garantie d'un avenir merveilleux en sa compagnie.
Le prince, quant à lui, est toujours éperdu d'amour au premier regard, fou de douleur quand il pense avoir perdu sa dulcinée, et prêt à braver tous les dangers, même les dragons et les sorcières, pour sauver la femme de sa vie. Et il le fait, le bougre !
Et quand ils s'embrassent, l'histoire se finit par "ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants".

Pour la suite, je soupçonne Grimm et Perrault, les deux principaux fauteurs de troubles, d'avoir laissé planer le doute pour la survie de l'humanité. Parce que s'ils avaient dit la vérité, pas dit que les petites filles auraient eu un jour envie de se marier et que les garçons aient osé s'en approcher... L'espèce humaine se serait alors éteinte petit à petit et je ne serais même pas là à t'écrire des trucs sur le sujet.
Donc, on peut leur dire merci. Mais seulement pour ça ! Parce que pour le grand bazar qu'ils ont généré en parallèle, on peut pas dire qu'on leur soit reconnaissant.

Déjà, le "ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants" est non seulement un leurre, mais aussi un non sens : comment peux-tu vivre heureux si t'as beaucoup d'enfants ? Eux, peut-être, parce qu'ils avaient une gouvernante et 4 valets par môme, tout ça dans un 1500m² et qu'ils n'avaient pas en plus à gérer le ménage, la bouffe, les devoirs et tutti quanti...
Mais nous ? Nous, pauvres roturiers qui allons à la mine pour nourrir notre progéniture et vivons dans un 60m² en début de couple (quand tout va bien), quand nous en avons un, d'enfant, UN SEUL, le couple frise la rupture 30 fois la première année de sa vie à cause du manque de sommeil, alors "beaucoup d'enfants" ?!
Ils sont venus dans mon salon, les écrivains, quand mes 2 (2 !!) enfants ont décidé de refaire la déco et y ont planté 3 tentes indiennes, des tambours de guerre et ont placé des playmobils et des légos en embuscade sous les tapis pour nous tenir éloignés à coups de voûte plantaire meurtries ? Non !
Donc, 1ère erreur : avoir mis tous les couples dans le même panier, royaux et roturiers ensemble, et toutes les époques à la même enseigne, moyen-âge et 21è siècle.

Ensuite, nos chers conteurs ont un peu mélangé les choses concernant le prince et la princesse.
La vraie histoire dans l'ordre, c'est la suivante :
Il était une fois, un prince et une princesse qui se rencontrèrent dans un pub, se plurent et papotèrent tant et tant qu'ils se sentirent bien vite épris l'un de l'autre. Ils se revirent plusieurs fois jusqu'à passer la seconde et, n'y tenant plus, s'embrassèrent goulûment mais sûrement, déclarant officiellement ouverte la passion qui allait les enflammer quelques temps.
Oui : quelques temps. Parce que la période idyllique qui s'écoule les premiers temps du couple est LA période enchantée, la période de nos rêves. De nos REVES ! Eh oui. Une période comme nous l'idéalisons et comme nous idéalisons l'autre.
Nous avons vu quoi, exactement, chez l'autre ? Qu'est-ce qui nous a fait nous en approcher, le/la renifler discrètement, lui donner une place toute chaude toute moelleuse dans notre cœur ? Bien souvent, ce sont nos envies, nos attentes, et... nos idéaux. Et alors que nous aimons chez l'autre des qualités qui nous font souvent défaut, nous allons petit à petit découvrir également ses défauts qui sont parfois aussi les nôtres. Au début, encore éblouis par tant de passion, les tourtereaux se convaincront que ce n'est pas très grave, que ces "petits" couacs ne sont que des broutilles, que cela changera certainement avec le temps. Et puis, les petits couacs deviendront plus grands, plus gênants... Et puis, les couacs deviendront si fréquents à mesure que la passion décroîtra, que les amoureux se diront qu'il y a eu tromperie sur la marchandise, que quand même, ce n'était pas à ça qu'ils s'attendaient.
Mais pourquoi diable cette période de grâce ne s'éternise-t-elle pas ? Pourquoi la vie de couple n'est-elle pas une douce continuité de son début si beau et enchanté ?
Eh bien parce que nous n'avons pas les super-pouvoirs de nous travestir très longtemps en "femme parfaite" ou en "prince charmant" et de répondre instinctivement à l'idéal de l'autre.
Nous "redevenons" donc nous-mêmes, et, investis de notre nouvelle apparence aux yeux de l'autre, nous lui devenons parfois un peu différent. Attention, il n'est pas ici question d'avoir trompé le chaland sur la marchandise, non non. Il est question d'avoir montré principalement ses bons côté à l'autre qui est bien content de se focaliser dessus pour ne pas voir le reste. Le jeu est là, et tout le monde y participe, content de garder ses œillères tant il a besoin de vivre cette période enchanteresse car tout le monde en a besoin.

Cela veut-il dire que la suite n'est que chaos et désolation ? Oui, complètement... (mais nooooooooon, j'déconne !! Ne vas pas tresser ta corde, revieeeeeeeeeens !!)

NON ET BIEN SUR QUE NON !! La suite, quand on décide de la connaître, est une autre partie de la vie de couple, celle de l'acceptation de l'autre, celle qui donnera naissance à l'Amour.
Mais qu'est-ce que l'Amour dans le couple, alors, si ce n'est pas la passion, l'idylle merveilleuse ?
Au risque de te donner un lieu commun, mon idée à moi, c'est que l'Amour, c'est accepter l'autre tel qu'il est et ne plus rien attendre de lui. Cela peut prendre 2 ans, 10 ans ou 50. C'est savoir que l'autre et soi ne sommes pas ensemble par hasard, que nous l'avons choisi à dessein, très inconsciemment évidemment.
C'est accepter que la vie nous a mis face à face pour grandir ensemble, pour nous apporter, par nos différence parfois immenses, cette complémentarité nécessaire à notre élévation. Tout cela se passe-t-il dans la douceur tout en coulant sur un long fleuve tranquille ? Eh bien cela dépend des couples et des caractères. Cela dit, les heurts, les vagues, les murs sont souvent présents et j'irai même jusqu'à dire qu'ils sont nécessaires, car la difficulté apporte son lot de questionnement et de remise en cause, de changement, et par là, aident à l'élévation de son être, grâce à et avec l'autre.

Alors Grimm et Perrault, dans tout ça ?
Ben je suis persuadée qu'ils ont vu tout bien juste, mais d'une manière que nous avons, depuis des siècles, du mal à décrypter, attirés comme nous le sommes par la facilité et les baguettes magiques... Le combat des sorcières, des dragons, l'attente de retrouver sa princesse ou son prince sont un préambule, certes, mais pas celui de la relation tel que nous le croyons. Quand le prince combat une sorcière ou un dragon, c'est peut-être l'image de lui ou la peur de l'autre, qu'il affronte ; et lorsque la princesse a en face d'elle une grenouille alors qu'elle venait d'embrasser un prince, c'est face à ses propres leurres qu'elle se retrouve. Et tout ça se passe PENDANT la relation, justement cette période d'apprentissage de l'autre, cette période floue et parfois périlleuse vécue entre les protagonistes de l'histoire. C'est la phase obligée pour atteindre l'autre dans son intégrité, et l'accueillir dans sa différence et sa complémentarité. C'est donc un préambule à l'acceptation complète de l'autre. 

Le "ils vécurent heureux" arrive donc non pas après ce premier baiser, mais après la passion passée, quand l'Amour vient s'installer. Et ce, quelque soit le nombre d'enfants, finalement...