vendredi 4 septembre 2015

Communication, mon amour




"Mais tu vas arrêter de me mâcher cette manche, oui !!", entends-je dans la cours de l'école par une maman excédée, semble-t-il, de répéter la même chose à son petit dont la manche est trempée jusqu'au coude.
Je suis choquée. Oui, cette maman est énervée, c'est évident, oui, le ton marque bien l'agacement... Mais non, je ne suis pas choquée par ça, étant moi-même bien coutumière de la chose, me retrouvant maintes fois aux prises avec l'irritation montante de répéter 30 fois la même chose à ma progéniture.

Mais qu'est ce qui me hérisse le poil, alors ?

Eh bien c'est une toute petite chose. Un rien qui se glisse dans la phrase et qui change tout. Un petit "me" qui n'a rien à faire là et qui vient mettre la pagaille et instiller une culpabilité qui n'a rien à faire là non plus.
Mais voilà. Les habitudes, la culture, les réflexes sont là, invisibles, sans que nous en soyons conscients. On a toujours entendu nos parents parler comme ça, on ne se pose même pas la question d'où ça vient et pourquoi c'est là.
Et pourtant, si on le faisait, on se rendrait compte que parfois, les tournures ont grande importance et les utiliser peut être critique.
Donc, "tu vas arrêter de ME mâcher cette manche" n'est non seulement pas correct grammaticalement, mais en plus, ajoute une direction à l'action : MOI.
Du coup, quand on ajoute un ME ou un NOUS dans la phrase, on accuse l'autre de ME ou NOUS faire quelque chose.
Là, en l’occurrence, le truc qui est tout déformé parce que mâchouillé à jusqu'à la fibre, c'est pas la maman, c'est la manche.
Quand un enfant se réveille dans la nuit, a mal aux gencives parce que des petites quenottes naissantes le taquinent, il ne NOUS fait pas ses dents ! Il fait ses dents, c'est tout.
Et étonnamment, il ne le fait pas exprès ! Dingue !
Et quand tu parles comme ça, du coup, ton tout petit est bien empêtré dans sa douleur et son inconfort, mais en plus, il entend qu'il fait quelque chose de pas bien à papa ou maman.

Ben oui, ça a un impact sur maman, sur papa ou tonton Eudes, parce que ça peut avoir comme conséquence d'avoir un t-shirt à laver, une nuit difficile ou encore un appel chez le médecin à passer... Certes. Mais faut pas non plus virer parano, c'est pas mal-intentionné a priori, et encore moins contre toi.

Quand tu as entendu ça toute ton enfance, plus tard, quand ton pote te dit "Mais qu'est-ce que tu nous fais, là ?" quand tu as une grippe carabinée et que tu n'es pas en état de venir à la super fiesta organisée par Robert, ben tu entends que c'est quand même pas sympa d'avoir la grippe, et que t'aurais pu être plus cool avec tes potes en étant en pleine forme.
Mais bon, c'est pas grave, ça te choque même pas, t'as l'habitude de culpabiliser, depuis le temps... Pare que tout petit, tu entendais aussi des "Arrête de faire crier ta mère !!" que ton père pouvait te lancer au Nième pétage de plomb maternel parce que tu ne voulais pas collaborer pour ranger ta chambre. Là, non seulement tu ne coopérais pas, mais en plus, on te faisait croire que tu avais un pouvoir spécifique sur les cordes vocale de ta daronne.

Autant que tu le saches, maintenant que tu as grandi, tu n'as pas de télécommande te permettant d'activer les octaves. Tu as une seule responsabilité, celle qui TE concerne, toi, tes actes et tes émotions. Et maintenant que tu as aussi des enfants, tu sais que parfois, pour la même connerie, en fonction de ton humeur, de ta journée et tes états d'âmes, tu hurleras, riras, grogneras ou t'en foutras royalement. En gros, ça dépendra de TOI ! et pas de ton fils qui n'a pas fait ci ou a cassé ça.

Alors même si tu l'as entendu quand tu étais petit(e), rien ne t'empêche de changer la construction de la phrase, la trajectoire des mots quand ils sont prêts à sortir.
Et si tu dis à tes cops que ton petit a fait une varicelle, dis-leur qu'il a fait une varicelle, pas qu'il T'a fait une varicelle. Parce que c'est pas à toi, qu'il a collé des boutons, mais bien à lui.






1 commentaire:

  1. oulàlà !!! Encore un p'tit mot qui me fait bien réfléchir... Faut que je réflechisse si je vais culpabiliser ce soir d'avoir mal tourné ma phrase aux enfants dans leur premières années... Mais non je rigole... Heureusement que t'es là pour tirer la sonnette d'alarme et nous faire nous rendre compte de certains de nos travers ! C'est sûr, je serai vigilant dorénavant... Merci ! jno

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